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2004 – Thalasso – Rencontres

Thalassoi J’utilisais ce temps de thalas-solo avant tout pour faire le point sur moi-même, mais je n’étais pas en retraite dans une cellule d’ermite, et avec le recul, un des intérêts de cette semaine était aussi de me plonger dans un milieu complètement inconnu, certes protégé, mais différent du monde dans lequel j’évolue d’habitude.

La clientèle était principalement constituée de couples âgés et beaucoup de femmes, les plus jeunes venues ici avec un bébé accaparant leur attention hors des soins, ou venues de délester de soucis qui curieusement, semblèrent très vite les rapprocher. Nous avions en effet, le lundi soir, une soirée d’accueil où les curistes pouvaient faire connaissance entre eux, et des petits duos de bavardage se formèrent ainsi entre les pensionnaires, quasiment pour toute la semaine.

Pour ma part, je fis la connaissance d’une femme d’une soixantaine d’années avec qui je passai le reste des soupers de la semaine à bavarder de nos vies respectives, ce qui était bien altruiste de sa part, car j’avais l’âge de ses filles et je devais lui paraître bien ennuyeuse! sa vie à elle avait été à la fois riche en réalisations (développement d’un cépage de Bourgogne avec son mari champennois, partis de zéro; et avec 4 enfants comme cerises sur le gâteau), riche en rencontres et, me semble-t-il, riche aussi en bonheurs, même si son veuvage brutal encore assez récent lui avait manifestement pesé.

J’ai un peu bavardé aussi, en fin de semaine, avec une autre jeune femme, à peine plus âgée que moi, qui semblait très nerveuse. En effet: elle était en instance de divorce, alors qu’elle était co-gérante d’une épicerie avec son futur ex-mari, situation évidemment difficile à vivre.

Et enfin avec un couple d’immigrés espagnols très âgés, un vieux monsieur un peu fatigué et une petite dame encore très vive, pleins de dignité et de bonté, le genre de couple que j’aimerais avoir encore dans 40 ans. Ils m’ont parlé de leurs enfants qui ne voulaient plus parler espagnol (une grande souffrance pour eux), de leur petite-fille qui faisait des études universitaires et qui ne voulait pas se marier ni avoir d’enfants (une autre souffrance pour eux), et ils m’interrogeaient comme s’ils voulaient comprendre si moi aussi j’étais à des années lumières de leurs valeurs. En effet, bizarrement, eux aussi me prenaient pour une étudiante, à croire que l’eau de mer m’avait rajeunie de 10 ans… alors je leur ai dit que mes parents aussi avaient rejeté le breton pour mieux asseoir leur réussite sociale, et que j’avais en effet fait des études supérieures, mais aussi deux enfants, et que leur petite-fille aurait bien le temps de changer d’avis en avançant dans sa vie de femme.

Je ne saurai jamais si cela les a un poil consolés. Ils étaient malgré tout lumineux, et le restent dans mon souvenir, c’est pourquoi je souhaitais leur consacrer ces quelques lignes, ainsi qu’à mon amie de tablée. Quand à la jeune femme en souffrance, j’espère que ce n’était qu’une étape vers du renouveau; c’est elle qui m’a expliqué le bien que fait une cure, et surtout comment les effets s’étalent dans le temps, et à quel intervalle, idéalement, le renouveler. Conseils que j’ai suivis d’ailleurs.

Je dois être quand même un peu bizarre: depuis toute petite, j’ai souvent préféré discuter avec des gens plus âgés qu’avec mes pairs. Enfant, j’adorais participer aux tablées d’adultes, et en classe, je me sentais souvent plus proche du prof que des autres gamins (mauvaise idée – j’en ai d’ailleurs bavé…). Cela m’a frappé à nouveau lors de ces rencontres. J’ai surtout réalisé que je recherchais avant tout chez les gens plus âgés soient des gens heureux (modèles à suivre, et source de joie de vivre) ou des gens savants (nécessaires à ma soif d’apprendre, et qui me font avancer à mon tour). Idéalement, ils peuvent aussi combiner les deux… ceux-là, je les appelle "les sages"…