L'actualité de ce mois de mai a le mérite de taper dans mes croyances les plus naïves… et de m'en faire prendre conscience.
D'abord DSK. C'est en lisant l'actualité financière sur Bloomberg le lundi matin, que j'ai découvert qu'il avait raté son rendez-vous avec Angela Merkel le dimanche soir. Que le FMI serait représenté par une récente recrue, spécialiste des marchés émergents, à la réunion de Bruxelles particulièrement critique pour l'euro, et donc pour les centaines de millions de gens qui en dépendent, le soir même.
Alors, dans un tel agenda, l'histoire d'un troussage de domestique, je ne pouvais pas y croire.
Dans le monde de mes croyances, l'autorité des gens les plus riches et les plus puissants de cette planète est méritée.
Elle s'est construite sur leur intelligence exceptionnelle, cette intelligence qui permet de comprendre et d'anticiper, de faire les bons choix et au final de faire progresser l'humanité dans les difficultés les plus complexes.
Elle s'est construite par leur capacité de travail extraordinaire, leurs convictions, leur passion, leur engagement, toute cette énergie qui fait qu'on les écoute, on les suit, on les imite.
On les appelle des leaders – leadership, en anglais.
Mais aussi dans le monde de mes croyances, chaque être humain est une personne à part entière. Quelles que soient ses souffrances, ses malchances, ses erreurs, chacun a son petit bout de chemin à parcourir au cours d'une vie souvent trop courte et trop rude pour progresser vraiment.
On m'a élevée dans le respect de l'autorité – supposée justifiée et méritée – ET dans le respect de l'autre – si petit, si moche soit-il ou elle.
Ma propre intelligence et mon propre travail ont fait que j'ai souvent logé dans des Sofitel et équivalents pour mon employeur. Et j'y ai souvent pensé que je me sentais plus proche des femmes de ménage que je croisais avec le sourire que certaine "femmes de" en vison qui ne me regardaient même pas dans l'ascenseur. Après tout, j'étais là pour travailler, moi aussi!
Alors que DSK, celui que l'humanité, même si c'est très indirectement, a élu pour diriger son organisation de finance internationale la plus importante sur le plan mondial, au point qu'on le considérait il y a 2 semaines encore comme plus puissant qu'Obama lui-même, se retrouve à faire le gorille cher à Brassens face à une pauvre femme mal née et malheureusement sur son chemin au mauvais moment… c'est ridicule! RI-DI-CU-LE!
Je voudrais tellement croire que les humains sont intelligents et en voie de progrès, à force d'éducation, de prises de conscience, de développement personnel et d'échanges multi-culturels…
Je voudrais tellement croire encore que les grands de ce monde sont pleins d'humanité, et non de bestialité.
Monsieur Strauss-Kahn, si vous avez dérapé, c'est bien plus que le viol, déjà inacceptable, d'une femme que vous avez fait. C'est le meurtre d'une certaine philanthropie, à laquelle j'adhérais naïvement. Si l'humanité doit être à l'image de ses leaders, ses leaders doivent être à l'image de l'humanité. Et là, vraiment, ce n'est pas glorieux…
Et là-dessus viennent les concombres! (sans vouloir faire de mauvaise blague. Cela pourrait être des tomates, ou de la salade…)
Il y a un ou deux ans, j'avais été traumatisée par la lecture de "Toxic", un essai racoleur de William Reymond sur la malbouffe, dont le premier chapitre se délecte à vous expliquer avec moult détails atroces l'agonie sanglante et puante d'un petit bonhomme de 2 ans et quelques mois, intoxiqué par une bactérie E. Coli dans un hamburger américain. Ce récit de viscères mangées par la bactérie sans que la médecine moderne ne puisse rien faire m'avait tellement choquée (c'est comme Ebola, juste moins contagieux) que je me suis tout de suite documentée sur la bactérie, pour apprendre, horreur totale, qu'il est plus probable de la trouver dans des graines germées biologiques que dans un hamburger aseptisé.
J'ai classé l'auteur dans la catégorie journalistes racoleurs sans rigueur scientifique et me suis méfiée quelque temps des graines germées, puis je n'y ai plus pensé.
Jusqu'à ce samedi où je lis que les jeunes femmes de mon âge intoxiquées en Allemagne avaient simplement mangé du concombre bio dans un buffet de salades.
Du concombre bio! L'alimentation saine par définition!
Alors je me rappelle… il y a 9 jours, nous étions au soleil avec les enfants et une poignée d'adeptes de l'agriculture de proximité, nous venions d'emballer une centaine de paniers bio distribués dans la région, et nous avons partagé des graines germées, de la tomme fraîche des chèvres de la ferme, et un peu de pain aux noix et un saucisson que j'avais amenés.
Des graines germées…
Il y a 6 jours, j'ai fait une salade de concombre bio acheté à la Coop, parce que j'avais envie de concombre pour accompagner un barbecue. Je l'ai pelé mais… venait-il d'Espagne? ai-je bien vérifié qu'il venait du Seeland, critère de proximité? et puis qui me dit que le Seeland n'engraisse pas ses légumes bio au purin de mammifères? Horreur.
Durée d'incubation: 10 jours!
Je me vois déjà mère indigne intoxicatrice de toute la famille!
Mais franchement, vous le mangez cuit, vous, le concombre? et les tomates? la salade? Les chinois, traditionnellement, cuisent tout, sauf les fruits, qui s'épluchent. Ils ont bien raison…
Vraiment, l'actualité est dure avec moi… en mai 2011, les leaders sont devenus des gorilles infréquentables et l'alimentation saine "5X fruits et légumes bio chaque jour" est contaminée par de sanglantes toxines. Il y a de quoi être déstabilisée!
Non… j'oublie un détail… les statistiques.
Statistiquement, tout cela est insignifiant. In-si-gni-fiant. Il y en a d'autres des DSK – par exemple Christine Lagarde, pas trop l'air d'un gorille à vue de média – et des concombres sains – comme tous que je mange depuis bientôt 40 ans, bio ou pas.
Ouf.
Il reste que cela avait le mérite de me faire me poser de bonnes questions sur quelques croyances naïves… rien n'est parfait, ni les directeurs de FMI, ni les concombres bio.