Je viens de faire un petit progrès, une vraie petite victoire sur moi-même, qui m’a donné beaucoup de joie et de confiance, alors je viens en partager un peu ici!
Pour Carnaval, je fais depuis 3 ans l’effort de déguiser mes puces en bricolant avec de vieux vêtements tant bien que mal, en comptant seulement sur mon imagination, car le travail manuel et artistique fait partie, avec le sport, de mes points faibles, depuis l’enfance où ces matières étaient toujours celles à problèmes dans mes carnets de note.
Mais cette année, mon inspiration, c’était les fleurs. Du coup, j’avais une très vague idée du costume et du masque à réaliser jusqu’à 2 semaines avant l’échéance, date à laquelle j’ai commencé à paniquer – comment donc arriver à mes fins dans les temps?
J’avais bien réalisé facilement 2 grandes corolles représentant les pétales avec une base en carton et du cordon élastique pour la fixation. Mais le dessin qui me venait intuitivement sur la feuille de mon "patron" impliquait clairement la réalisation d’une robe verte pour chaque petite. Or je n’avais absolument rien de ce style dans mes fringues de récup et surtout rien d’homogène.
Or, pour Noël, Mari Charmant avait ramené une machine à coudre à la maison: lui avait le vague espoir qu’une main habile de passage nous aiderait à recoudre la moitié des rideaux qui pendouille, et moi j’avais encouragé l’achat avec la conviction que ce serait lui qui s’y collerait… En effet, je suis complètement allergique à toute activité sérieuse de couture, ou pire, de tricot, depuis les décevantes tentatives de m’y initier par ma mère pendant mon enfance. Pas mon truc, je suis une intello moi! En outre, je suis toujours apeurée devant toute machine susceptible de transformer mon inévitable maladresse en carnage (j’ai déjà passé par la clinique de la main à cause d’un simple couteau de cuisine!).
Résultat: la machine était toujours dans son emballage, au grenier, dans l’attente d’une prochaine visite de Sainte-Maman-La-Super-Couturière.
Alors soudain m’est venu l’illumination. Avec cette machine, coudre 2 robes vertes pour mes petites fleurs ne devrait pas être une grande affaire pour Mari Charmant, si je lui préparais le tissu moi-même avec les instructions.
Je suis donc allée acheter le tissu en profitant de mon jour de congé, et le week-end venu, j’ai tracé le patron que j’avais imaginé à la craie, découpé les morceaux à assembler, et descendu la machine dans son emballage pas déballé.
Curieusement, juste à ce moment-là, Mari Charmant s’est trouvé fort occupé à réaliser des roses des sables corn-flakes-chocolat avec les filles, d’après une recette dénichée par Lili (fortuitement?). Pressée par le temps, J-6 dans le calendrier donc J-2 dans mon agenda de maman à double vie travail-maison, je me donc suis vue forcée de déballer la machine moi-même.
Diantre! c’est bigrement compliqué une machine à coudre. Impossible, en regardant la chose à vide, de comprendre par où va passer le fil. Normal: il y a DEUX fils, mais cela, je ne le sais pas encore. Je presse de questions Mari Charmant: c’est une machine, c’est son rayon, il sait tout cela naturellement. Hummmm. Il est vraiment TRES occupé avec les roses des sables. Et il commence à émettre des messages bizarres – "tu fais attention, tu ne vas pas te traverser un doigt avec l’aiguille, n’est-ce pas?". J’ai sorti le mode d’emploi pour comprendre moi-même au moins le vocabulaire (c’est quoi une canette?) en attendant qu’il mette enfin la machine en ordre de marche par lui-même, et voilà que… je le vois mal à l’aise.
Mes petites antennes kerleanesques commencent à m’alarmer: homme-pas-à-l’aise! homme-pas-à-l’aise!
Explication: j’ai étudié et travaillé avec des hommes depuis plus de 15 ans, plus longtemps encore que mon compagnonnage avec Mari Charmant, et à force, j’ai développé ces petites antennes qui me disent quand l’homme sait… ou pas. Parce que visiblement, il n’y a rien de pire pour la vaste majorité des gars que j’ai côtoyés que d’avouer: "je ne sais pas", en tout cas dès qu’il s’agit d’un domaine technique genre la voiture ou le lave-vaisselle en panne, sans parler des projets complexes dans lesquels je rame avec eux au boulot (et quand ce genre d’attitude conduit à découvrir à la dernière minute un problème qui donne un an de retard au projet global parce que pas un gars n’a osé communiquer ses doutes, cela me désespère, mais c’est une autre histoire).
Et là petite antenne a dit: Mari Charmant n’a pas plus que toi idée de ce qu’est une canette, et en outre, lire le mode d’emploi est un acte tellement humiliant pour lui qu’il est inimaginable de lui imposer cet affront à son sacro-saint honneur masculin en ce chouette dimanche après-midi passé dans la bonne humeur autour des enfants, entre le projet gourmand des roses des sables et la fièvre des préparatifs carnavalesques…
Alors voilà comment, probablement en sauvant l’honneur de Mari Charmant, j’ai appris MOI-MEME ce qu’est une canette – il suffisait de savoir lire et suivre les instructions – et cousu MOI-MEME les deux robes. Y compris les ourlets des manches, car la machine dispose d’un bras libre. Y compris même un patch circulaire au col de la robe d’Ondine, que dans mon ignorance totale des pratiques de base de la couture j’avais découpé beaucoup trop large initialement.
Le résultat restait certes très amateur à regarder de près, mais a valu aux filles un joli succès d’estime au concours de masques (17èmes) et même une photo dans l’édition spéciale d’un journal local, ce qui les a beaucoup impressionnées. J’ai d’ailleurs eu le droit aux chaleureux remerciements de Lili – "tu sais, il n’y a pas beaucoup de mamans de mes copines qui font quelque-chose pour le carnaval". Yeeepppeee.
Je ne suis pas toujours très disponible pour jouer avec mes puces, mais elles savent qu’elles peuvent compter sur un gros investissement de mon temps si précieux pour les grandes occasions qui ponctuent les années enfantines – anniversaires, fêtes d’école, etc. D’après ce que je me souviens de ma propre enfance, c’est essentiel.
Mais ce-faisant, j’ai aussi impressionné mes deux gourous de référence, Mari Charmant qui connaît assez ma hantise des travaux manuels et des machines pour savoir l’effort psychologique que j’y ai mis, et Super-Maman, qui mise au courant par le "téléphone arabe" version bretonne (via ma soeur), s’est soudain retrouvée ravie de voir enfin atteint le résultat attendu (patiemment) depuis 30 ans: eh oui, Kerleane se met à la couture! tout arrive!
N’exagérons rien: la machine est repartie au grenier et les rideaux pendouillent encore jusqu’à nouvel ordre (voire calendes grecques).
Mais cela faisait longtemps que je n’avais pas réalisé un tel petit progrès personnel, et cela m’a causé une grande joie, au point même que je suis plus en confiance depuis quelques jours sur différents projets professionnels…
En effet, à l’idée de tout ce que je peux encore apprendre avec un peu d’effort, la vie devant moi me paraît pleine de promesses de petites et grandes joies!
Je vous en souhaite autant: je suis sûre que la vie de chacun est pleine de ces petits pas en avant, mais trop souvent, on ne voit que les obstacles, et pas les avancées…
Bravo Kerleane
Faudrait que je ressorte la mienne de machine à coudre.
On a des points communs.
Bise
Carole
Si tu la “ressors” c’est que tu l’as déjà sortie: c’est déjà un pas de plus 😉
A vrai-dire je connais peu de fans de couture… je crois que c’est passé de mode avec l’envahissement des fringues Made In China… reste le carnaval…
elles sont supers trognons tes petites fleures!
je me suis mise a essayer la machine cet été. pour des peintures murales que j’ai faites, j’ai voulus coudre les bords. j’étais bien contente qu’une copine aie pue me montrer comment faire. parce que aussi simple que cela à l’air, il faut la faire marcher cette machine!
depuis j’attends d’avoir le temps/de prendre le temps de coudre des habis. ca fait des années que j’aimerais m’en faire. Je suis sure qu’une belle jupe simple, avec un bon tissue ne dois pas etre si compliqué à faire.
j’ai toujours gardée un coté trés manuels, malgré mon coté technique. c’est un besoin, j’adore faire les trucs avec les mains, et y trouve un vrai plaisir et appreciation de belles choses faites à la main.
c’est presque une thérapie pour moi, une méditation dont j’ai besoin.
Manue, rien que ton pseudo il est parlant pour cela! Manue… manuelle… pour ma part j’aimerais bien développer un plus grand ancrage dans l’existence avec le corps qui bouge, les mains qui créent. Mais c’est plus fort que moi, mon truc à moi, c’est lire et écrire, trop cérébral tout cela.ce qui m’a plus le plus dans l’exercice du carnaval, c’était visualiser les petites (grandes!) fleurs dans ma tête et faire le patron sur papier à l’échelle 1:10 avec les proportions imaginées: toujours les concepts d’abord!
comment pourrais t’on même faire des trucs si on ne les conceptualizais pas avant?;)
justement c’est une des choses qui me plais dans les projects manuels. c’est de les voir aboutir de la pensée à quelque chose de tangible. de voir comment parfois il faut un peu changer/adapter l’idée concept au monde matériel.
je trouve cela fascinant comme rencontre de l’abstrait et du matériel.
mais c’est sur qu’un bon livre, quand même, c’est trés fort:)
L’envie de donner un déguisement avec à Amour à tes filles t’a permis de dépasser tes propres limites.
Le résultat est là.
J’adore te lire, ton style est pétillant.
Merci pour ce partage.
Merci Benoît, j’aime beaucoup le terme pétillant – il est vrai que je déborde d’énergie depuis quelques mois et une partie du trop-plein arrive ici! (et par ailleurs il me reste encore à comprendre comment le bouchon a sauté!)