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La rentrée des uns, la sortie des autres

Voilà.

La rentrée est arrivée.

En douceur, d'abord nous, puis les enfants; retour progressif aux rythmes de l'année scolaire.

Le retour au travail était étrange pour moi. Revenir pour mieux partir. Finir différents mandats. Et négocier la suite. Etrange période schizophrénique où je suis encore le chef et la collaboratrice de mon plus probable prospect commercial à court terme. Tous ceux-là font comme si je ne partais pas, pas vraiment. Cela rompt des équilibres. Ils restent entre hommes. Ils commencent déjà à marquer leurs territoires, à se défier. Et il y a les autres, qui ont appris mon départ sur l'intranet, avec les autres départs. Je ne suis pas la seule. Comment communiquer? Je ne veux pas mentir non plus. Certains facteurs ont précipité ma décision de mettre en oeuvre un projet de longue date certes, mais qui aurait pu dormir 10 ans encore dans d'autres circonstances.

Il reste tout ce que j'ai envie de laisser en héritage. Une équipe gonflée à bloc. Toutes les inventions qui restaient dans un coin de ma tête et dont, clause de non concurrence oblige, je n'aurai de toute façon pas l'usage. Des messages, de ces grands messages que j'adore construire maintenant, de la vision technologique… mais le temps est trop court. Et tout ce que je n'arrive pas à construire, à réaliser, m'encombre et me fatigue, comme si ma tête était trop lourde de toutes ces idées, de tous ces projets non concrétisés et pourtant jamais oubliés. 

Et pourtant je sais que je dois lâcher tout cela, m'en libérer, pour m'ouvrir l'esprit à d'autres savoirs. Ma créativité bouillonne, ma soif d'apprendre aussi… mais j'ai aussi pris du recul, je connais mes forces et mes faiblesses; il me faut développer mon ancrage et ma confiance pour réaliser davantage. Désormais livrée à moi-même comme jamais…

Etonnamment, je n'ai pas peur. J'ai tous les risques en tête et passe un certain temps à les minimiser, mais ils ne m'empêchent pas de dormir, car je suis libre d'agir de différentes manières. Cette liberté est extraordinaire. Je n'avais jamais accordé beaucoup d'importance à cette valeur, mais c'est fou comme on peut être aveugle dans certaines situations. Je n'avais plus aucune liberté dans mon espace professionnel  et je ne le supporte pas. En fait, je n'ai jamais supporté les situations étouffantes. Je me rends compte aussi que je n'ai pas eu la liberté à laquelle j'aspirais pendant l'enfance. Et que si je suis si bien dans mon couple, c'est parce que nos individualismes respectifs nous laissent nous éclater dans nos espaces de liberté pour mieux se retrouver et s'enrichir mutuellement de nos découvertes personnelles.

D'avoir pris ma liberté a des effets secondaires aussi. Après plus de 30 ans (!) j'ai brutalement perdu l'habitude de me ronger les ongles. Je m'exprime franchement et me sens comme une autre personne, comme si j'étais enfin devenue adulte, sur le plan de la gestion des émotions. Je les reconnais, je les observe, je les exprime ou je les utilise, mais elles ne me débordent plus. Bien sûr, 3 semaines de vacances ont fait des miracles. Mais tout de même, c'est surprenant.

J'ai pris conscience aussi de tout ce que mon entourage me demande. J'aurais crevé d'épuisement à ce rythme, à toujours m'adapter au besoin d'autrui quitte à sacrifier mon propre ressenti. Je me diluais. Cela n'est plus possible. Il y a des effets de bord étranges – j'avais la capacité depuis toujours à passer des messages positifs aux autres, mais souvent ces messages n'avaient pas d'impact. Maintenant je vois clairement quels messages positifs ET impactants je peux passer. C'est là aussi une expérience incroyable, car il faut un culot que je n'ai jamais eu. Et à ma grande surprise, cela ne casse rien. Au contraire. Jamais on ne m'a autant respectée… et écoutée!

J'en regrette presque de quitter mon rôle de cadre maintenant. Je vais avoir un rôle tellement différent… et pour quels clients? mon positionnement est pointu – comment cibler leur besoin en arrivant au bon moment, avec la bonne offre? je vais devoir travailler mon réseau, mon écoute, mettre mes petites antennes au point… et parfois bizarrement j'ai l'intuition que cela va m'emmener vers autre chose, une nouvelle aventure technologique mais plus profondément porteuse de sens pour moi que ne l'étaient les précédentes tout au long de mes études, de ma carrière. J'ai passé toute ma vie à apprendre plus qu'à créer. J'ai encore quelques progrès à faire dans mon développement personnel et mes apprentissages, mais je commence à être mûre et sage maintenant, il devient temps pour moi de créer davantage, de réaliser davantage, d'avoir plus d'impact sur le monde.

Pour le rendre plus beau. Une évidence pour moi, en tout cas… Mais comment?