Petite-fille de ploucs

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Avertissement: si vous n’avez pas d’ancêtre breton, et/ou que vous rêvez d’aller courir dans les landes embrumées ou sur les rochers battus par l’écume, que Bretagne rime pour vous avec ses légendes mêlant vivants et morts, marins et fantômes, vieux grééments et chapelles dans le vent, binious et kan-ha-diskan, crêpes, chouchens et langoustines: passez votre chemin, ou à la rigueur, allez directement sur ma note "Kerleane" pour une version quelque peu plus idéalisée de mes racines centre-armoricaines.

Vous voilà avertis!la lecture de "Fils de ploucs" donne un éclairage inhabituel, mais tellement réaliste, sur l’évolution de ces bretons qui sont passés brutalement d’une enfance partiellement occupée par la garde des vaches entre cailloux et talus au statut nettement plus confortable des classes moyennes et supérieures – merci l’école…

Rien d’original: dans les années 70, Per Jakez Hélias a publié "Le cheval d’orgueil" sur le même sujet. Mais, comme l’explique fort bien Jean Rohou, il a un peu enjolivé… ou alors, le pays bigouden dans les années 20 était décidément une contrée nettement plus extraordinaire, par la richesse de ses traditions et l’exceptionnel caractère de ses habitants, que le Léon des années 40 raconté par Jean Rohou… ou le Poher des années 50 qui n’avait pas encore tant évolué quand je l’ai connu moi-même dans les années 70!

Il ne faut pas oublier que pendant longtemps, les bretons étaient les "immigrés" parmi les plus méprisés dans les faubourgs parisiens, ce qui donna naissance à des termes comme "ploucs" (originaires d’un de ces villages Plou-quelque-chose-d’imprononçable!) ou "baragouiner" (des mots bretons "pain" et "vin").

Quand ils rentraient au pays, quelle frime… car derrière tout cela, une société humaine pas différente des autres… On peut l’idéaliser, c’est le propre des antiquités; mais comme dans toute société de ce type, il y avait des enfants qui rêvaient de la quitter – l’école les y a aidés, même si pour cela, ils ont dû renier leur langue maternelle pour les nouveaux savoirs que véhiculait l’enseignement du français. Au bout du chemin, le progrès, et une vie meilleure. Si si: Rohou le dit, mon père aussi, ils sont assez vieux pour être sages; et croyez-moi, petite-fille de ploucs de fait, je n’ai aucune envie de retourner traire les vaches deux fois par jour, même si je vis entourée de pâturages et leurs sons de cloches aujourd’hui: c’est çà le progrès, on garde seulement le meilleur

Bref, impossible de résumer en une note ce précieux documentaire de plus de 700 pages (et ce n’est que le tome 1!). Il fourmille d’anecdotes et on y apprend aussi beaucoup, en particulier sur quelques réalités historiques, sociales ou culturelles que la mode du folklore celte a quelque-peu améliorées dans l’imaginaire populaire… mais faut pas trop le dire, car cela fait tourner le tourisme, qui reste quand même, avec les cochons, une des plus grandes sources de revenus de ces régions!

One thought on “Petite-fille de ploucs

  1. “Plou-quelque-chose-d’imprononçable!) ou “baragouiner” (des mots bretons “pain” et “vin”).”
    Voilà un blog trés didactique!
    J’aime bien apprendre des choses comme ça au détour d’une rue de notre quartier!
    Trés drole aussi ton lien sur le cochon!!
    Et puis, je dois avouer que la Bretagne m’inspire!!
    La dernière fois que j’y suis allée, c’était sur l’île de Groix, et je dois dire que tu ajoutes l’insularité à la ‘magie’ bretonne, et moi, j’étais conquise!!
    Adelphiquement.Evelyne.

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